COUCHER DE SOLEIL SUR PLOUMANACH'

Publié le par Carabosse

 

Le soleil déclinant égratigne le ciel pâle de longues zébrures pourpres. Une main invisible éclabousse le firmament de mille tâches de couleur qui dansent entre les nuages alanguis, pour couler doucement dans l'océan, loin, bien loin derrière l'horizon.

 La mer assoupie caresse les rochers de ses longues mèches argentées, dans un tendre et incessant murmure. La plage, débarrassée par la dernière marée de ses fards et de ses grotesques atours de papiers gras s'offre, dans sa sauvage beauté.

Troublantes retrouvailles ; Ce soir, la mer parée comme une reine fait l'amour au sable chaud.

 

 

 

 

Cachée entre deux rochers, témoin discret de leurs timides attouchements, de leurs impudiques étreintes, je repais mon âme de cet instant de paix et d'intense bonheur. Les cris et les rires bruyants de vacanciers se sont enfin éteints, rendant la parole à l'océan, aux oiseaux.

 

 

Je bois ce silence rempli du doux ressac des eaux et du piaillement des mouettes. Une vague câline vient lécher les pieds de Saint Guirrec, déposant en offrande une guirlande d'algues brune et mousseuse, avant de se retirer dans une gracieuse révérence.

 

 

Face à la baie de Ploumanac'h, le château de Costaeres se découpe en ombre sinistre. Dans cet écrin d'irréelle beauté, le rêve épouse la réalité, les fantasmes prennent forme. La mouette s'est faite vampire et s'éloigne dans un inquiétant battement d'ailes, pour revenir en une interminable glissade camper sur le donjon, en vigilant cerbère.

La côte de granit rose s'irise de teintes cuivrées, les éboulis de roc se fondent dans une pénombre violette ; Paysage échappé d'un autre âge, d'un autre monde ? Quel apocalyptique séisme, quel courroux divin a ainsi désintégré le rivage en montagnes de pierre, semant le long des terres d'Armor mille silhouettes pétrifiées de monstres antédiluviens ?

 

 

 

Allongée sur la pierre tiède, je me perds dans l'immensité d'un ciel de crépuscule. Instant béni de communion avec l'univers, je ne suis plus personne, plus rien qu'une infime partie de cet immense et grandiose puzzle. L'être humain, ses petits soucis, ses aspirations mesquines, ses vaines ambitions, ses paroles futiles, n'existe plus.

Ne reste que l'âme, seule et souveraine. Le microcosme retournant au macrocosme ; L'âme et sa dimension retrouvée, se mêlant aux astres, aux cieux, aux monts, aux océans, au parfum des fleurs, au chant des oiseaux.

En cette seconde bénie, mon âme éperdue de reconnaissance pour cette beauté offerte, se noie dans une félicité sans limite.

 

 

 

Un coucher de soleil sur l'océan, un champ fleuri dans la campagne baignée de printemps, un ciel d'azur vertigineux de pureté... Une vague d'amour et d'allégresse qui vous renverse et vous transporte en dehors de vous-même ; Plus absolue, plus intense que les dérisoires satisfactions terrestres, que la richesse, que la gloire, que le pouvoir ; La sensation brutale de l'immortalité

 

 

La soudaine certitude d'appartenir à un univers ordonné et réfléchi, excluant le hasard et les caprices de l'existence ; La perception d'une volonté, d'une intelligence supèrieures, d'un divin architecte...

L'approche de dieu, tout simplement, à travers sa création.

 

 

Publié dans RIEN QUE DES FLEURS